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LES PORTS TERRITORIAUX : AMBITION - ACTION - ANTICIPATION

Information générale

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17/12/2025

Pourquoi convoquer cette notion de « ports territoriaux » ? Et ne pas opposer directement des « petits » ports ou ports « secondaires » aux grands et très grands ports par lesquels transitent des dizaines de millions de tonnes de marchandises les plus variées, des vracs liquides et solides aux conteneurs, remplis eux-mêmes de toute la diversité des échanges commerciaux… Cette appellation péjorative de « ports secondaires » reviendrait en fait à nier l’utilité et les services rendus par les ports « territoriaux ». 

En France, le port « territorial » répond d’abord à une définition institutionnelle. En 1984, les lois de décentralisation transfèrent la gestion des 403 ports « locaux » de l’Etat vers les départements. Puis en 2006, les ports d’intérêt nationaux, à l’exception de celui de Saint-Pierre et Miquelon, sont transférés aux Régions. Par défaut sont donc des ports territoriaux ceux qui ne sont pas des Grands Ports Maritimes (GPM). Ces derniers, au nombre de dix, relèvent directement de la tutelle de l’Etat. A l’inverse, celle des 529 ports territoriaux est exercée par une ou plusieurs collectivités locales, départements ou Régions principalement, sous des formes juridiques variées qui permettent une souplesse d’association entre ces collectivités. Ces 529 ports territoriaux totalisent 20% du trafic de marchandises des ports français et 80% de celui des passagers, selon les données de l’association qui les représentent, l’Association Nationale des Ports Maritimes Territoriaux (ANPMT). Ces deux chiffres témoignent manifestement de toute leur importance.

Mais cette définition institutionnelle est purement française. Ailleurs en Europe, des ports majeurs comme Hambourg, Rotterdam ou Anvers ont pour propriétaire le Land de Hambourg, la municipalité de Rotterdam à hauteur de 70% contre 30% au gouvernement néerlandais, ou les villes d’Anvers (80,2%) et de Bruges (19,8%).

Un port territorial peut aussi répondre plus globalement à une définition fonctionnelle et géographique, fondée sur l’hinterland. Les ports jouent un rôle d’interface entre la mer et la terre, entre les flux maritimes incarnés par le navire, et de l’autre les flux terrestres qui permettent de drainer l’hinterland ou la zone de chalandise du port. Le triptyque portuaire de Vigarié a laissé la place à des chaînes logistiques de plus en plus intégrées dont le port ne représente qu’un maillon. Les plus grands ports sont les nœuds de chaînes logistiques à vocation nationale et internationale. Ils tissent des liens maritimes avec les autres continents et desservent de vastes hinterlands, qui peuvent parfois, pour les portes majeures comme Anvers ou Rotterdam, s’étendre à l’ensemble du continent européen.

A l’inverse, un port « territorial » ne rayonne que sur un hinterland plus limité, le plus souvent régional, qui constitue son territoire fonctionnel de référence. En effet, ses trafics maritimes s’expliquent directement par les besoins de ce territoire fonctionnel et par la plus ou moins grande richesse du tissu économique associé à ce territoire : approvisionnement énergétique en hydrocarbures ou de ses dérivés, matériaux nécessaires au secteur du BTP, engrais ou produits alimentaires du bétail pour l’agriculture… Les vracs liquides ou solides dominent le plus souvent, acheminés par transbordement puis cabotage depuis les plus grands ports via des navires de type handymax, mais parfois directement depuis une destination maritime internationale via des navires de plus grande taille de type panamax, voire aframax. Pour les conteneurs, des lignes feeders peuvent les relier même si cela s’avère beaucoup plus rare tant la conteneurisation nécessite des volumes de trafic important pour justifier de l’utilisation régulière de navires feeder dont les capacités de transport ont augmenté avec celles des navires-mères.

L’importance des ports dans l’Union européenne est révélée par la part modale du transport maritime pour le trafic domestique et intra-européen. Elle s’élève à 28% en tonnes-kilomètres, largement devant le rail (12%) et la voie d’eau (3,5%), devancée seulement par la route (54%). Elle s’explique par l’ensemble des flux entre les ports européens, non seulement entre les plus grands, mais aussi entre ces derniers et les ports territoriaux via les trafics de cabotage. 

A ce trafic territorial des marchandises s’ajoutent les trafics passagers, principalement de deux types. Les trafics des ferries permettent de relier les îles, plus ou moins lointaines, plus ou moins attractives économiquement et touristiquement, expliquant par exemple les trafics impressionnants et diversifiés (marchandises et passagers) du port de Calais, cordon ombilical entre le continent et le Royaume-Uni, ou à l’inverse des trafics beaucoup plus saisonniers vers l’île de Beauté depuis Nice ou Toulon, ou depuis les ports bretons vers les myriades d’îles de ce Finistère. S’ajoutent les trafics de la croisière qui prennent parfois une ampleur inédite si l’attractivité touristique des lieux les rend incontournable dans l’offre proposée par les compagnies de croisière. 80% des trafics portuaires passagers en France sont issus des ports territoriaux.  

En mettant le focus sur ces ports territoriaux, ce nouveau volume de la collection Océanides de la fondation Sefacil permet de montrer toute l’importance de ces ports et des enjeux auxquels ils font face en s’appuyant systématiquement sur des exemples précis. La première partie « Ambition » insiste sur leur définition, leur rôle et leurs activités ; la seconde « Action » dévoile les opportunités de développement pour ces ports alors que la dernière partie « Anticipation » met en lumière les nombreux défis qu’ils doivent anticiper. A la lecture de l’ouvrage, le lecteur prend conscience que ces ports « territoriaux » présentent finalement des problématiques et des enjeux très similaires à ceux des « grands » ports. Ils concernent la transition énergétique, la transition écologique, la transition numérique et la sûreté, l’aménagement de l’espace et in fine la question de leur gouvernance. 

Comme les plus grands ports, les ports territoriaux sont confrontés à la question de la transition énergétique. La baisse progressive de l’utilisation des énergies fossiles devrait remettre en cause des rentes de situation et leur modèle économique. Ils peuvent constituer des bases-arrières de maintenance des parcs éoliens offshore si le développement de ces derniers se confirme. Ils seront sans doute amenés à être impliqués dans l’approvisionnement des territoires dans les nouvelles énergies issues de l’hydrogène vert comme le méthanol ou l’ammoniac même si les unités de production, pour atteindre une dimension industrielle favorable aux économies d’échelle, devraient se situer dans les plus grands ports.


Retrouvez la suite et l'ensemble du document de la Fondation Sefacil, sous l'égide de la Fondation de France, avec le lien : https://www.sefacil.com/wp-content/uploads/2025/10/Les-ports-territoriaux_2025.pdf 



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